Un lien controversé

La recherche a longtemps buté sur une con­tro­verse sim­i­laire à celle con­cer­nant les psy­choses : les dépres­sions que lon observe chez les con­som­ma­teurs et con­som­ma­tri­ces de cannabis sont-elles réelle­ment liées à la con­som­ma­tion ?

Effets psy­chiques

Définition de la dépression

Selon l’Organisation mon­di­ale de la san­té (OMS), la dépres­sion est un trou­ble men­tal car­ac­térisé par une tristesse per­sis­tante et une perte d’intérêt ou de plaisir pour des activ­ités autre­fois appré­ciées. Ce trou­ble affecte pro­fondé­ment le fonc­tion­nement quo­ti­di­en : chaque action demande un effort accru, et la fatigue men­tale devient omniprésente.

Par­mi les symp­tômes fréquents, on retrou­ve : 

  • une perte d’intérêt ou de plaisir dans la vie quo­ti­di­enne 
  • des trou­bles du som­meil 
  • des dif­fi­cultés de con­cen­tra­tion 
  • une baisse de la libido 
  • des vari­a­tions d’appétit (aug­men­ta­tion ou diminu­tion)   

La dépres­sion amène aus­si sou­vent à des pen­sées néga­tives engen­drant :  

  • une diminu­tion de la con­fi­ance en soi  
  • des sen­ti­ments de cul­pa­bil­ité  
  • des pen­sées déval­orisantes sur soi-même, etc.

Quel lien avec la consommation de cannabis ? 

Les études ont mon­tré que la dépres­sion est plus fréquente chez les per­son­nes con­som­mant régulière­ment du cannabis.1 Cer­tains symp­tômes dépres­sifs, comme l’anhédonie (inca­pac­ité à ressen­tir du plaisir), peu­vent même être accen­tués par la con­som­ma­tion.1

Par ailleurs, l’arrêt du cannabis chez des per­son­nes souf­frant de dépres­sion est sou­vent asso­cié à une atténu­a­tion des symp­tômes.1

Cepen­dant, établir un lien de causal­ité direct entre cannabis et dépres­sion reste com­plexe. Les deux trou­bles parta­gent cer­tains symp­tômes, et les effets du cannabis vari­ent selon les indi­vidus. Par exem­ple, le récep­teur CB1 (cible prin­ci­pale du THC) peut tan­tôt ampli­fi­er, tan­tôt réduire l’anxiété.2 Cette ambiva­lence com­plique l’évaluation de son impact réel sur la dépres­sion, d’autant plus que les modes de con­som­ma­tion, les dos­es et les fréquences dif­fèrent d’une per­son­ne à l’autre. 

Les don­nées disponibles sug­gèrent toute­fois un lien bidi­rec­tion­nel : la con­som­ma­tion de cannabis peut favoris­er l’apparition de la dépres­sion, et inverse­ment.1 Le dosage joue égale­ment un rôle clé : à faible dose, le THC pour­rait avoir un effet béné­fique tem­po­raire, tan­dis qu’une con­som­ma­tion régulière tend à aggraver les symp­tômes.1

Un risque accru chez les adolescent·e·s

Chez les adolescent·e·s, il s’avère que la con­som­ma­tion de cannabis est un pré­dicteur de risque de dépres­sion.1 Les adolescent·e·s qui con­som­ment quo­ti­di­en­nement du cannabis ont env­i­ron 30% plus de chances de dévelop­per une dépres­sion.3

Il est impor­tant de soulign­er que le cannabis n’est pas tou­jours la cause directe de la dépres­sion. Il agit sou­vent comme un révéla­teur de fragilités psy­chiques préex­is­tantes, que l’arrêt de la con­som­ma­tion ne suf­fit pas à résoudre. Dans ces cas-là, le sevrage ne doit pas être vu comme une fin en soi, mais comme une étape vers une prise en charge glob­ale de la san­té men­tale. 

  1. Lan­glois, C., Potvin, S., Khullar, A., & Tour­j­man, S. V. (2021). Down and High : Reflec­tions Regard­ing Depres­sion and Cannabis. Fron­tiers in Psy­chi­a­try, 12, 625158.[][][][][][]
  2. Patel, S., & Hillard, C. J. (2009). Role of Endo­cannabi­noid Sig­nal­ing in Anx­i­ety and Depres­sion. Cur­rent top­ics in behav­ioral neu­ro­sciences, 1, 10.1007/978 – 3‑540 – 88955-7_14.[]
  3. Esmaeelzadeh, S., Moraros, J., Thor­pe, L., & Bird, Y. (2018). Exam­in­ing the Asso­ci­a­tion and Direc­tion­al­i­ty between Men­tal Health Dis­or­ders and Sub­stance Use among Ado­les­cents and Young Adults in the U.S. and Cana­da — A Sys­tem­at­ic Review and Meta-Analy­sis. Jour­nal of Clin­i­cal Med­i­cine, 7(12), 543.[]